Dire que notre secteur agricole souffre de graves problèmes de revenu, quelle que soit la production, répéter qu’il est très difficile de trouver des solutions et d’avoir une vision pour la gestion de nos exploitations n’est ni nouveau ni suffisant. Nous en sommes tous conscients.

Marianne Streel

De plus en plus s’installe une impression de distance avec le pouvoir européen, qui pose des choix difficiles à comprendre, comme la décision de signer des accords commerciaux inacceptables pour notre secteur. Sur le dossier PAC, nous attendons beaucoup de cette nouvelle commission, tout récemment désignée. A cet égard, la FWA veut dès l’installation concrète de la Commission, lui faire entendre ses revendications et ses craintes légitimes pour l’avenir du secteur.

Il y a urgence également, à commencer à travailler très concrètement au niveau du gouvernement régional pour mettre en place des solutions avec les acteurs concernés, tant pour notre élevage que pour nos productions végétales.

Au fédéral, 5 mois après les élections, il y a obligation de former un gouvernement dans les plus brefs délais, sous peine d’accentuer encore les difficultés des citoyens belges. Il faut empoigner fermement l’intégralité des dossiers ouverts, tant sur le plan politique qu’économique, ou social, car de nombreuses questions urgentes sont à régler. Pour nous, en tant que syndicat, il est difficile de travailler et de faire avancer des dossiers, avec un gouvernement qui, dans les faits, est en affaire courante depuis presque le tout début de l’année 2019.

La question climatique prend aussi, et c’est normal, une place significative dans le débat politique et médiatique. A ce sujet, les intervenants dans le débat, réclamant un changement de cap radical pour notre société, sont nombreux et viennent de tous les horizons. Nous, les agriculteurs, nous posons beaucoup de questions quant à notre place dans cette problématique, ainsi que dans l’économie de notre région ou de notre pays. Notre évident manque de compétitivité sur les marchés mondiaux, auxquels nos productions sont pourtant soumises, est une source d’inquiétude constante qu’il faut pouvoir affronter et questionner, de même que la place que nous occupons dans la société.

Aujourd’hui, l’agriculture intéresse beaucoup de monde, et c’est tant mieux. Par contre, elle est souvent commentée, critiquée, par des personnes qui n’en connaissent pas les réalités, et qui proposent dès lors des pistes de solutions qui ne sont pas réalistes, et donc non applicables.

Dans les médias, tant dans les émissions de téléréalité comme « L’amour est dans le pré » que dans les débats politiques, notre agriculture est très présente. Il en est de même dans les émissions d’investigations, ou dites d’information, où, il faut le reconnaître, l’objectivité dans le traitement des sujets n’est pas toujours aussi présente qu’elle le devrait.

Pire, on a aussi vu apparaître plus récemment des émissions où l’on interroge le citoyen lambda sur des thématiques d’actualités, dont l’agriculture fait parfois partie. L’émission « 7 à décider » diffusée la semaine dernière sur la question de la consommation de viande, en est un exemple parmi d’autres.

Je ne me lancerai pas dans une analyse des publications des uns et des autres sur les réseaux sociaux, où, bien à l’abri derrière leurs écrans, certains se permettent de diffuser des informations fausses, de faire des commentaires irrespectueux, voire parfois haineux. C’est aussi un lieu où de nombreux lobbyistes font avancer leurs points de vue, suivis de près par des citoyens qui n’ont pas toujours le recul nécessaire, et qui partagent, commentent, sans prendre conscience de la subjectivité du propos, ou des enjeux qu’il sous-tend. 

Pourtant, lorsqu’on interroge la population au cours d’un sondage au sujet de l’agriculture et des agriculteurs, le retour est toujours positif. Notre image, celle de notre profession, est globalement bonne parmi nos concitoyens. Ce qui semble sujet à polémique, c’est plutôt certaines de nos pratiques, de nos manières de travailler. On peut sans doute incriminer une perte de lien entre les citoyens et la réalité de ce qu’est notre profession dans son travail quotidien. Pour nous agriculteurs, il est souvent difficile de faire la part des choses, et de se souvenir qu’au-delà de certaines réactions critiques sur nos pratiques, notre image reste positive dans la société.

Depuis quelques mois, en plus de ces commentaires agressifs sur les réseaux sociaux, et d’un reflet parfois peu glorieux car peu réaliste dans les médias, nous devons faire face à de nouvelles difficultés sur le terrain.

Les plaintes des villageois sur notre secteur se multiplient : les odeurs, le bruit, la terre sur la route… Des aspects autrefois acceptés comme étant partie intégrante des conséquences de notre travail sont aujourd’hui l’occasion de vives réactions de certains ruraux. Des altercations violentes éclatent ainsi parfois, ce qui choque et déstabilise très logiquement l’agriculteur, qui tente d’exercer son métier dans le respect de tous. Il y a quelques semaines, l’attaque inacceptable d’un poulailler dans la région de Gembloux, par des anti-spécistes, est un exemple particulièrement choquant d’atteinte à une personne et à ses biens, ainsi qu’aux animaux dont certains sont morts des suites de cette agression. La montée de la tendance « végan » et la virulence de ceux qui la prônent est une autre source de dénigrement de notre profession.

Ce week-end, plusieurs coups de fil d’agriculteurs désemparés, stressés, en colère, m’ont témoigné d’événements malheureux auquel nous n’arrivons pas à nous habituer : plaintes à cause de la présence de vaches en prairie alors qu’il pleut, ou parce que notre matériel agricole est trop imposant, ou trop bruyant, travail en soirée (fort logique, en pleine saison de récoltes d’automne en betteraves ou pommes de terre)… Après la peur du pulvérisateur, c’est désormais notre production toute entière et ses pratiques qui sont attaqués.

La FWA a défini les valeurs qu’elle défend, et c’est probablement le bon moment de les rappeler. La FWA veut promouvoir une agriculture familiale, solidaire, durable et fière.

Fière ! Fière de son travail, de ses produits, et prête à les défendre et à les promouvoir avec passion et acharnement. C’est notre rôle aussi, en tant qu’agriculteurs. Nous devons expliquer, encore et encore, aux citoyens, aux habitants, aux consommateurs, pourquoi et comment nous travaillons.

Nous vous encourageons à proposer à vos communes d’organiser des soirées afin de parler de notre métier, de notre secteur, de ses réalités, de ses pratiques, de ses difficultés.

En cliquant ici, vous trouverez un tableau imprimable que nous vous invitons à apposer dans votre ferme, à la vue des passants. Vous le trouverez aussi en pleine page dans l'édition de Pleinchamp de ce jeudi 10 octobre. De notre côté, nous voulons le faire parvenir dans toutes les communes, pour en proposer la diffusion dans les bulletins d’infos aux habitants qui existent désormais partout, de même que sur les sites web des communes rurales. Nous vous invitons à sensibiliser aussi vos pouvoirs locaux, et à insister pour qu’ils utilisent ce tableau dans le bulletin communal, qu’ils le donnent aux nouveaux habitants. 

Nous sommes fiers de notre agriculture, n’ayons pas peur de le dire !