Dans la foulée des élections du 26 mai dernier, négociateurs et informateurs consultent tous azimuts et travaillent discrètement mais sûrement sur les différentes formules de majorité possibles. Si les choses semblent a priori bien compliquées du côté du Fédéral et dans le nord du pays, les scénarios sont sans doute un peu plus prévisibles au niveau de la Wallonie, même si diverses alternatives restent sur la table.

Au-delà des discussions entre partis, la préparation d’une majorité et d’un programme passe aussi par la prise d’avis auprès des acteurs socio-professionnels représentatifs de la société civile dont les priorités peuvent tantôt converger, tantôt diverger, mais qui, tous, souhaitent participer à un débat démocratique aux larges perspectives. La FWA, membre du Conseil Economique, Social et Environnemental de Wallonie (le CESE Wallonie) a donc pu rencontrer Elio Di Rupo et Paul Magnette ce 6 juin.

Alain Masure

La rencontre avec les deux négociateurs du PS, premier parti wallon à l’issue du récent scrutin, s’est en effet déroulée la semaine dernière dans le cadre d’une consultation plus large de tous les représentants syndicaux, patronaux et environnementaux du CESE Wallonie. La FWA siégeant sur le banc patronal en compagnie de l’Union Wallonne des Entreprises (UWE), de l’Union des Classes Moyennes (UCM), de la confédération intersectorielle des employeurs du secteur social et non marchand (UNIPSO) et du Syndicat neutre des Indépendants (SNI), a donc   présenté à cette occasion ses priorités au niveau wallon.

Une chose est cependant d’ores et déjà certaine : rien ne sera vraiment simple pour constituer des majorités dans les deux grandes régions de la Belgique et au niveau fédéral. Les écarts encore agrandis par des votes significatifs vers les partis « extrémistes » de gauche, côté wallon, et de droite, côté flamand, rendront évidemment très délicats des accords potentiels. Si l’on considère en outre que les budget fédéral et wallon sont en posture difficile et que le financement de la sécurité sociale wallonne dépend de transferts importants de la Flandre et de Bruxelles, on imagine bien les difficultés à affronter dans ce secteur clé pour l’unité du pays. Messieurs Di Rupo et Magnette ont en outre insisté sur l’inévitable « transition » écologique que la Société réclame et sur le développement de l’économie circulaire qui devra y être lié.

Lors des échanges entre les différents invités et les hôtes du jour, plusieurs points communs sont en tous cas apparus clairement dans les souhaits présentés : le besoin d’une concertation sociale permanente et encore renforcée par rapport au passé et qui devra améliorer la qualité administrative et législative évitant quiproquos et incohérences trop fréquents entre différentes législations ; le développement des secteurs économiques wallons et de l’emploi qui devront apporter plus de valeur ajoutée à la Région, l’agroalimentaire étant en la matière un bel exemple de développement à concrétiser ; la mise en place de mesures de réelle simplification au niveau des démarches administratives trop souvent inutilement complexifiées par l’administration wallonne ; une adéquation plus grande des formations scolaires et postscolaires aux besoins du marché de l’emploi ; des avancées écologiques tenant compte de ce qui existe déjà et a déjà été fait … et la liste est loin d’être terminée.

Du côté de la FWA, un certain nombre de grands dossiers prioritaires ont ainsi pu être évoqués. L’agriculture est un secteur dont la valeur de production, autour des deux milliards d’euros, mérite un département à part entière et un ministre de l’agriculture fort. Le revenu de nos agriculteurs demeure un très grand problème qui ne pourra être réglé pour la plupart d’entre eux que par une politique européenne des marchés mieux encadrée et une future PAC budgétairement renforcée qui assurera, via les aides couplées et découplées, un complément de revenu bien nécessaire. Circuits courts et marchés publics de règleront pas tout même s’il faut les renforcer. Enfin, la fonction nourricière de l’agriculture doit être reconnue et préservée notamment des grands projets d’urbanisation.

Le secteur agricole relève déjà les défis environnementaux et climatiques qui sont posés à l’ensemble de la société. La FWA et ses membres veulent être des acteurs à part entière dans les politiques à venir. Les 3 piliers de la durabilité devront être traités ensemble dans toute recherche de solutions : l’économique et le social ont évidemment autant d’importance que l’environnemental. Au demeurant, dans ce domaine, la recherche et l’enseignement agronomiques (CRAW et les facultés et hautes écoles de bioingénieurs) doivent rester axées sur le développement d’une agriculture « écologiquement intensive », permettant d’organiser la transition correctement. Il faut accepter des modes de production variés qui créent de la complémentarité entre les agriculteurs plutôt que des oppositions. Garantir un avenir aux jeunes repreneurs, renforcer l’image du secteur et développer une communication objective et intelligente vers l’ensemble de la société sont d’autres objectifs urgents à poursuivre.

La FWA s’est donc positionée clairement comme interlocuteur de premier plan de la concertation socio-professionnelle en Wallonie, mais qui devra se faire en toute transparence et en privilégiant l’analyse et la réflexion plutôt que la précipitation qui fut hélas trop souvent la règle au cours de cette dernière législature.

 

Gardons l’espoir que nos souhaits ne resteront pas lettre morte !