Alimentées par des précipitations d’une intensité et d’une hauteur jamais observées, tombant sur un sol déjà saturé par les intempéries incessantes depuis un mois, des inondations cataclysmiques ont déferlé sur plusieurs zones de Wallonie. De nombreuses vies humaines ont été perdues, la liste des villes et villages dévastés est longue, l’ampleur des dégâts est indescriptible. Et malheureusement ce scénario s’est reproduit à Dinant, Namur et dans les vallées des affluents de la Haute-Meuse ce dernier week-end. Votre Plein Champ consacre un très large dossier à ces évènements catastrophiques jamais connus au moins depuis les inondations séculaires de 1926.

 

José Renard

 

Nos premières pensées iront vers celles et ceux qui ont perdu un être cher dans ces inondations dramatiques ou qui sont toujours dans l’attente d’être fixés sur le sort de personnes toujours portées disparues. Bien évidemment, nous ne pouvons pas non plus rester insensibles à la situation de ces milliers de familles aujourd’hui sans logement et pour qui toute l’histoire d’une vie a été emportée en quelques minutes par les flots en furie. La plaie ouverte en Wallonie par ces évènements apocalyptiques est béante et mettra très longtemps à se fermer. La cicatrice en restera bien visible, bien présente dans les mémoires et demandera des années pour s’atténuer.

Dans ce contexte de profonde tristesse, il faut souligner comment la sidération face au déchaînement de la nature qui nous laisse tous impuissants, a rapidement cédé la place à la solidarité et à la mobilisation citoyennes. Cette entraide entre nos concitoyens est remarquable et réchauffe les cœurs.

 

A la FWA, nous sommes fiers de constater que de nombreux agriculteurs, y inclus certains directement touchés par les crues, ont, avec leurs tracteurs, tonneaux, pompes, engins de manutention secondé efficacement les services de secours face à la situation d’urgence et aidé leurs voisins à tenter de sauver ce qui pouvait encore l’être.

De tels évènements, leur ampleur et leur violence ne manquent pas de susciter une batterie importante de questions: pourquoi, comment? Ces questions doivent être posées mais il est indispensable d’analyser objectivement l’ensemble des données sans oublier quelques principes de base. Comme le rappelait la professeure Aurore Degré de Gembloux AgroBiotech dans une interview du 15 juillet dernier: «avec des pluies comme ça, même une forêt primaire aurait été inondée». Cette observation empreinte de bon sens mériterait d’être rappelée à tous ceux, experts auto-proclamés, qui ont un avis sur les causes et raisons des inondations. Je dirais même, plutôt qu’un avis sur tout, surtout un avis face à la tentation de la caméra ou du micro.

 

Le bilan humain n’est pas encore définitif que la confrérie des doigts tendus s’empresse de rechercher des responsables et encore plus de désigner des coupables de ces évènements dramatiques. Est-ce vraiment de cette recherche de coupables dont les sinistrés ont besoin aujourd’hui? Consacrer du temps et de l’énergie à alimenter cette machine à stigmatiser, est-ce le moyen le plus efficace de construire la Wallonie de demain pour que telles situations ne se produisent plus ou en tout cas ne se traduisent pas par des conséquences aussi terribles?

Nous le répétons depuis de nombreuses années, si chez nous, le dérèglement climatique se traduit d’abord par la répétition de période de très forte sécheresse de grande amplitude territoriale et de longue durée, il faut aussi s’attendre à une plus grande fréquence d’épisodes de précipitations très abondantes et surtout très violentes et fortement concentrées. Il faut donc se préparer à gérer ce type de précipitations.

 

La responsabilité humaine dans ces inondations est très souvent mise en avant dans ces nombreux avis: urbanisation, aménagement du territoire,…. Les pratiques agricoles n’échappent pas à ces réquisitoires: augmentation de la taille des parcelles agricoles, arrachage des haies, tassement des sols, cultures de printemps, diminution des haies…Chacun y va de son exemple et de son contre-exemple à l’appui de sa thèse. Rappelons simplement que la vallée de la Vesdre est une zone majoritairement de prairies et que le pays de Herve compte encore de nombreuses haies.

 

Selon la professeure Degré, dans la même interview, c’est l’imperméabilisation des sols, en général, qui accentue la gravité des inondations. Les terres agricoles ne sont donc pas les seules surfaces en cause et une vision globale est nécessaire pour s’attaquer au risque d’inondation et [elle] «trouve injuste de stigmatiser les agriculteurs». La FWA rejoint complètement cette vision non pas pour exonérer l’agriculture de toute action mais bien pour souligner la nécessité de penser globalement tout en agissant localement. Les agriculteurs veulent être associés à cette réflexion globale et y prendre leur part mais refusent de porter seuls le chapeau.

 

Et les dommages subis par les agriculteurs, dégâts aux cultures et aux bâtiments, pertes de bétail, dans tout cela? Certains agriculteurs ont aussi beaucoup perdu suite aux inondations. L’évaluation complète du nombre d’exploitations touchées ainsi que des superficies de cultures et prairies touchées prendra du temps. Le Gouvernement wallon a décidé de lancer d’initiative une procédure de reconnaissance comme calamité publique. La FWA accompagne ses membres dans les différentes procédures. Plusieurs articles en pages intérieures y sont consacrés.

Dès le 14 juillet nous avons alerté l’autorité fédérale sur le besoin de souplesse concernant le relogement d’animaux évacués d’urgence de bâtiments et de prairies prisonniers des eaux. Nous avons obtenu confirmation de l’AFSCA et du Ministre Clarinval à ce sujet

Au-delà des mesures d’urgence et de constatation des dégâts, les chantiers concernant les agriculteurs sinistrés sont gigantesques: (re)constitution des stocks de fourrage et de paille, réfection des clôtures, nettoyage des parcelles recouvertes de détritus et de cailloux sans oublier la multitude de dispositions administratives.

Les services de la FWA s’y attèlent sans relâche aux côtés de nos membres victimes de ces évènements dramatiques.