Vu de chez Delhaize…
Plein Champ– Madame Decoster, d’où vient ce projet de partenariat avec la coopérative Biomilk?
Marjan Decoster- Pour remettre la chose dans son contexte, il faut savoir que dans la filière dont je m’occupe (crèmerie et œufs) comme dans beaucoup d’autres chez nous, il y a une volonté claire de notre enseigne de favoriser l’achat sur le marché belge. Cette philosophie d’achat concerne le lait, mais aussi les produits laitiers transformés, à chaque fois que c’est possible. En 2018, nous avons eu un premier contact avec la coopérative Biomilk qui cherchait une filière durable pour sa commercialisation. Comme cela s’inscrivait totalement dans notre politique d’achat sur notre territoire, et de surcroît en label bio, nous avons entamé des discussions avec les coopérateurs pour trouver un terrain d’entente. C’est, je crois, le tout premier partenariat qui s’organise ainsi directement entre les producteurs et une enseigne de la grande distribution.
PC- Concrètement, comment ce partenariat fonctionne-t-il?
MD- L’idée derrière ce partenariat, c’est vraiment de garder un contact permanent avec la coopérative et les producteurs qui la composent. Nous avons un contrat avec la structure qui prévoit à la fois un prix «fair» (équitable), et nous nous engageons aussi sur un volume d’achat annuel. C’est évidemment intéressant pour la coopérative, qui a ainsi la garantie de voir une part fixe de sa production commercialisée à un prix qui est, lui aussi, garanti. Cela permet aux producteurs de se projeter sur du long terme. Nous maintenons une relation constante avec la coopérative, et nous travaillons dans la transparence et le dialogue: si quelque chose ne convient pas à l’une ou l’autre partie, nous en discutons en direct, et nous cherchons des solutions ensemble.
PC- De son côté, la coopérative a aussi des engagements à votre égard?
MD- Outre les volumes à fournir, les producteurs ont aussi un rôle d’ambassadeurs dans ce partenariat. Il est important que le client puisse voir le visage de l’agriculteur derrière le produit fini. Ponctuellement, les agriculteurs de la coopérative viennent donc faire déguster les produits dans nos magasins, et dialoguent avec les clients. C’est un aspect du partenariat qui est important, et que nous avons dû interrompre en raison de la covid, mais qui reprendra dès que possible. Les produits de la gamme sont aussi identifiés par le logo de Biomilk et des informations sur le partenariat et les conditions de productions apparaissent aussi sur les emballages, dans cette même logique de lien entre le producteur et le consommateur. Aussi, nous informons notre personnel de ce partenariat, et les agriculteurs de la coopérative sont aussi venus à plusieurs foires internes pour présenter et expliquer leurs produits, afin que notre personnel en magasin connaisse la gamme et contribue à sa valorisation.
PC- Depuis le début de ce partenariat, comment a t’il évolué?
MD- Nous avons élargi la gamme des produits proposés. Via plusieurs transformateurs, toujours belges, nous avons pu proposer au départ des yaourts, de la crème et du lait de consommation, puis nous avons développé cette gamme avec 3 fromages, des crèmes glacées, un yaourt grec, d’autres yaourts, du l ait frais…; Aujourd’hui, c’est une vingtaine de produits différents qui sont issus des fermes Biomilk et qui, au travers de transformateurs belges, sont proposés dans nos rayons. A chaque fois qu’une opportunité se présente, nous continuons à créer de nouveaux débouchés et de nouveaux produits en accord avec la coopérative, pour pérenniser ce partenariat et valoriser le lait des agriculteurs de Biomilk. En parallèle, nous avons aussi tra vaillé sur un packaging plus écologique pour le lait, qui est cohérent avec le positionnement bio qui sous-tend la coopérative.
PC- En conclusion, c’est un partenariat porteur?
MD- Comme je l’ai dit, le prix négocié avec la coopérative doit rémunérer le producteur laitier de façon équitable. C’est important pour Delhaize, et aussi pour ses clients, qui se montrent vraiment intéressés par cette garantie d’un prix juste, d’une provenance locale et d’un label bio qui assure aussi que le produit s’inscrit dans un cahier des charges connu et sûr.
C’est un partenariat commercial dans lequel chacun doit trouver son compte, qui doit être équilibré, et je pense que c’est vraiment le cas. Notre volonté est vraiment de le faire perdurer et se développer sur le long terme, dans le dialogue et dans la transparence avec Biomilk et ses producteurs.
Biomilk.be – Delhaize: un partenariat win win
Biomilk.be, c’est la signature qui se cache derrière le lait, les yaourts, les fromages, les crèmes ou autres glaces siglées «bio» sous la marque distributeur des enseignes Delhaize. Cette coopérative, qui propose une sélection de produits bio fabriqués à base de lait 100% belge, compte dans ses rangs une quarantaine de producteurs certifiés, répartis dans toute la Belgique. Luc Hollands, lui-même éleveur à Teuven dans les Fourons, en est le Président. Il nous explique la nature de la collaboration durable qui s’est nouée entre la coopérative et la chaîne de grande distribution qui garantit aux éleveurs une juste rémunération.
Marie-France Vienne

PC- Luc Hollands, quelle est la genèse de Biomilk?
LH- Créée en 2002 par des éleveurs laitiers flamands bio, la coopérative s’appelait à la base «Biomelk» avant d’être rejointe par un groupe de producteurs wallons en 2006 pour former l’entité «Biomelk Vlaanderen – Biolait Wallonie» désormais dénommée «Biomilk.be» depuis 2017 afin de souligner le caractère belge du groupement. Elle comptera bientôt dix nouveaux producteurs wallons, principalement issus de la région germanophone, et deux flamands. De 15 millions de litres de lait cette année, nous passerons à 20 millions en 2022, ce qui représente environ 25% de la production totale de lait bio en Belgique.
PC -Quelles sont les relations entre Biomilk.be et ses producteurs?
LH- C’est une grande famille, tout le monde est sur le même pied d’égalité et s’inscrit dans l’esprit d’une coopérative dans toute la noblesse du terme. Le Conseil d’Administration est composé de neuf agriculteurs et nous organisons au moins trois réunions par an avec les producteurs avec, par exemple, la présence d’un technicien pour évoquer la qualité du lait, un spécialiste en alimentation pour développer le résultat des dernières recherches scientifiques.
PC- Quand avez-vous initié ce partenariat avec Delhaize et sur quelle base fonctionne-t-il?
LH - Cela fait trois ans que nous avons établi ce partenariat. Nous avons un accord sur un prix équitable basé sur la moyenne des comptabilités de nos exploitations. Il prend en compte la dimension de la main-d’œuvre et des investissements pour se situer dans une fourchette qui oscille entre 0,45€ et 0,50€/litre contre 0,30€ à 0,33€ pour le réseau conventionnel. La formation du prix se définit de concert avec Delhaize, le transformateur de son choix et notre coopérative dans le respect des producteurs. La brique de lait ½ écrémé sera ensuite vendue à 0,99€ et 1,25€ pour le lait entier. Nous avons 18 références en yaourt, lait frais, glaces, mais aussi du Herve Société bio pour lequel nous fournissons du lait AOP.
PC- Quel est l’intérêt de ce partenariat pour votre coopérative et ses producteurs?
LH - Il y a une exclusivité sur la distribution, mais aussi la garantie que le lait bio utilisé proviendra de notre pays avec un tarif équitable pour l’agriculteur. Il faut savoir que le prix n’est pas un critère de choix chez le consommateur bio qui plébiscite les produits en fonction de leur origine, en l’occurrence la Belgique, et la parfaite traçabilité que nous pouvons lui garantir. Notre logo est repris sur chaque produit permettant aux consommateurs de retrouver sur le site biomilk.be la fiche d’identité de chaque producteur et de son exploitation. C’est ce qui fait l’une des forces de ce partenariat pour notre coopérative, l’autre étant bien sûr d’obtenir un prix juste sujet à révisions régulières.