Au 1er janvier 2021 devrait entrer en application le nouveau règlement bio européen. Pour vous accompagner dans cette transition, la FWA vous propose de retrouver chaque mois dans ses pages bio des articles présentant, pour chaque secteur, les nouvelles règles de production. Le premier article de cette série est consacré aux ruminants. Quels sont les changements auxquels on doit se conformer lorsqu’on est éleveur de bovins, d’ovins ou de caprins ?

Laura Lahon


Le nouveau règlement de base relatif à la production biologique a été adopté en 2018 par le Conseil et le Parlement européen. Il entrera en application dès le 1 janvier 2021. Ce règlement de base est adjoint d’actes d’exécution et d’actes délégués. Les actes d’exécution concernent des mesures d’harmonisation entre Etats-membres. Les actes délégués amendent ou complètent le règlement de base. Ces actes sont à la seule initiative de la Commission européenne et ont pour but de préciser les règles de bases afin de réduire les interprétations trop divergentes des Etats membres.

Pour faire face à ces nombreux changements, la FWA vous propose de répondre à vos questions et de vous faire découvrir les nouvelles dispositions qui s’appliqueront à vous prochainement. Toutes les autres dispositions, non évoquées ici, sont maintenues dans le nouveau règlement. Les autres règles restent donc inchangées. Pour les ruminants, c’est le cas notamment des densités d’élevage et des surfaces minimales des espaces intérieurs et extérieurs, des périodes de conversion des animaux non biologiques, du choix de races sélectionnées pour éviter certaines maladies et problèmes vétérinaires comme les césariennes, etc.

Quoi de neuf pour les ruminants?

La bonne nouvelle pour les éleveurs de ruminants, c’est qu’il s’agit d’un des secteurs les moins chamboulés par le nouveau règlement bio! Les changements entrainés par l’adoption de cette nouvelle législation sont peu nombreux et limités à ceux présentés dans cet article.

 

  • Provenance des aliments: le nouveau règlement européen prévoit d’augmenter la proportion d’aliments qui devront obligatoirement être issus de l’exploitation elle-même ou d’autres exploitations biologiques ou en conversion de la région, dans l’alimentation des animaux, à partir du 1er janvier 2023. Cette proportion va passer de 60 à 70% pour les élevages de bovins, d’ovins et de caprins.

 

  • Aliments en conversion: l’ancien règlement permettait d’incorporer dans la formule alimentaire moyenne jusqu’à 30% maximum d’aliments en deuxième année de conversion venant de l’extérieur de l’exploitation ou jusqu’à 30% maximum d’aliments en première et en deuxième années de conversion en cas d’utilisation simultanée. Le nouveau règlement réduit cette incorporation à maximum 25% d’aliments en deuxième année de conversion venant de l’extérieur de l’exploitation ou à maximum 25% d’aliments en première et en deuxième années de conversion en cas d’utilisation simultanée. Pour rappel, la quantité totale moyenne d’aliments donnés aux animaux peut provenir à concurrence de 20% de l’utilisation en pâturage ou en culture de prairies permanentes, de parcelles à fourrage pérenne ou de protéagineux semés sous le régime de l’agriculture biologique sur des parcelles en première année de conversion, pour autant que celles-ci fassent partie de l’exploitation.

 

  • Lait maternel: les veaux non sevrés doivent être nourris de préférence au lait maternel pendant une période minimale de 90 jours à compter de la naissance, ce qui est plus précis que les 3 mois stipulés dans l’ancien règlement. Pour les animaux des espèces ovine et caprine, cette période minimale est toujours de 45 jours, à compter de la naissance. Alors que l’ancien règlement stipulait uniquement que les animaux non sevrés doivent être nourris avec des laits naturels, et de préférence du lait maternel, le nouveau règlement interdit formellement l’utilisation d’aliments d’allaitement de remplacement contenant des composants chimiques de synthèse ou des composants d’origine végétale.

 

  • Gestion des animaux: l’ablation des bourgeons de corne peut être autorisée au cas par cas, uniquement lorsqu’elle améliore la santé, le bien-être ou l’hygiène des animaux ou lorsque la sécurité des travailleurs est compromise. L’ancien règlement n’en faisait pas mention. L’autorisation de poser des élastiques à la queue des moutons disparait également du prochain règlement. La coupe de la queue, qui doit également être autorisée à titre exceptionnel et au cas par cas, est plus limitée dans le nouveau règlement et ne concerne plus que les ovins. L’écornage est toujours permis, au cas par cas également. L’autorisation pour ces opérations doit être dûment justifiée et ces dernières doivent être réalisées par un personnel qualifié.

 

  • Traitement vétérinaire: dans le nouveau règlement, le temps d’attente pour la production de denrées alimentaires à partir d’un animal ayant subi l’administration de traitements vétérinaires allopathiques chimique de synthèse, y compris d’un antibiotique, ou de traitements antiparasitaires, y compris dans le cadre d’un programme obligatoire de lutte et d’éradication, est doublé par rapport au temps d’attente visé à l’article 11 de la directive 2001/82/CE ou, lorsque ce temps n’est pas précisé, est fixé au minimum à 48 heures. L’ancien règlement ne faisait que préciser qu’en l’absence de délai légal, le délai d’attente est fixé à 48 heures. Désormais, même un délai légal de 0 jour impliquera donc un délai d’attente de 48 heures.

 

Changements supplémentaires spécifiques aux bovins

 

  • Attache des bovins: comme dans le précédent règlement, l’attache des animaux d’élevage reste interdite, à moins que ces mesures concernent des animaux individuels pendant une période limitée et pour autant qu’elles soient justifiées pour des raisons de sécurité, de bien-être ou vétérinaires. Alors que le règlement actuel prévoit des dérogations à l’attache des bovins pour les exploitations de petite taille pour lesquelles il n’est pas possible de garder les bovins en groupes adaptés à leurs besoins comportementaux, la notion d’«exploitations de petite taille» est clarifiée dans le futur règlement. Cette dérogation ne pourra plus être obtenue que par les exploitations comportant au maximum 50 animaux (en décomptant les jeunes). Bien entendu, ces animaux devront toujours avoir accès à des pâturages pendant la saison de pacage et à des espaces de plein air, au moins deux fois par semaine, lorsque l’accès à des pâturages n’est pas possible.

 

  • Logement des veaux: alors que l’ancien règlement interdisait purement et simplement le logement des veaux âgés de plus d’une semaine dans des boxes individuels, le nouveau règlement l’interdit à moins que ces mesures concernent des animaux individuels pendant une durée limitée et pour autant qu’elles soient justifiées par des raisons vétérinaires. Lorsqu’un veau est traité individuellement pour des raisons vétérinaires, il est maintenu dans des espaces dotés d’un sol en dur et dispose d’une litière de paille. Le veau doit être capable de se retourner aisément et de s’allonger confortablement sur toute sa longueur.

 

  • Phase finale d’engraissement: l’ancien règlement autorisait que la phase finale d’engraissement des bovins adultes destinés à la production de viande ait lieu à l’intérieur, pour autant que la période passée à l’intérieur n’excède pas un cinquième de leur vie, et en tout état de cause, une période de trois mois. Cette autorisation a été supprimée dans le nouveau règlement et malgré les nombreuses demandes, il n’a pas été possible de la réinstaurer.

 

  • Accès aux espaces de plein air: d’une manière générale, les animaux d’élevage doivent bénéficier d’un accès permanent à des espaces de plein air, de préférence à des pâturages, chaque fois que les conditions climatiques et l’état du sol le permettent, sauf si des restrictions et des obligations sont imposées en vertu de la législation européenne. C’est ainsi que, tout comme dans l’ancien règlement, les animaux doivent avoir accès aux pâturages pour brouter à chaque fois que les conditions le permettent. L’ancien règlement précisait qu’en dépit de cette règle, les taureaux de plus d’un an devaient avoir accès aux pâturages ou à un espace de plein air toute l’année. Le nouveau règlement élargit cette obligation à tous les bovins mâles de plus d’un an.