RTBF : « Un œil sur demain » au regard peu aiguisé

Le JT de la RTBF du dimanche 28/05 a pu choquer plus d’un connaisseur du monde agricole. Au détour d’un reportage sur la viande de synthèse étaient jetées des informations erronées, voire mensongères, sur l’agriculture et l’élevage. Des informations qu’une simple recherche sur le site du même média permet pourtant d’invalider. D’où cette question : la RTBF joue-t-elle le jeu des populistes environnementaux ou a-t-elle simplement oublié que son métier premier est de vérifier ses informations ? Ça mérite bien une Fake News, notre nouvelle chronique qui décrypte les médias.

Quand la RTBF profite d’un reportage sur la viande de synthèse pour participer à la désinformation du public et à la fracture entre l’agriculteur et le concitoyen, on a le droit de (cri)tiquer. La RTBF, le principal média de la Belgique francophone, un média réputé sérieux et professionnel, qui tombe dans les travers de l’agri-bashing, vraiment ?

La viande de synthèse meilleure pour l’environnement ? Fake News. 15 000 litres d’eau pour 1 kg de viande de bœuf ? Fake News. Des cultures de céréales nécessitant énormément d’engrais et de pesticide ? Fake News. Le problème des gaz à effet de serre ? À remettre dans son contexte.

Pour s’en convaincre, nous avons simplement décidé de décrypter ces informations via le filtre… De la RTBF. RTBF contre RTBF, le match promet d’être beau ! Installez-vous confortablement et regardez la RTBF contrer les arguments de la RTBF. Décryptage des intox.

Fake News et pourtant c’est comme ça qu’est introduit le sujet… Mais que dit pourtant la RTBF par rapport à l’empreinte écologique de la viande in vitro ?!

Un reportage du 15 mai 2023 intitulé « La viande de synthèse est-elle vraiment meilleure pour la planète ? Pas si sûr… » indique pourtant, chiffres à l’appui, que « La facture pourrait être 4 à 25 fois plus nocive pour le climat qu’un élevage classique ». Qu’en est-il ? La RTBF continue l’analyse : « En 2019, une étude soulignait en effet que ces bioréacteurs produisaient du méthane, un gaz beaucoup plus polluant que le CO2. Quand on prend en compte la production de cette viande sous microscope à long terme, elle deviendrait ainsi particulièrement nocive. »

Mais du coup, on fait quoi ? On continue de baratiner ?

Pour comprendre ce chiffre, il faut comprendre l’étude. Quand on parle de 15 000 litres d’eau pour 1kg de viande, ce n’est pas statistiquement faux… Mais, comme l’indique le reportage de la RTBF intitulé « Journée de la Terre = stop aux idées reçues sur la nourriture, agissons efficacement à table ! », cette donnée prend en compte l’eau de pluie qui permet de faire pousser l’herbe broutée par les bovins.

Pour comprendre ce chiffre de 15 000 litres qui tient plus du marketing de la peur que d’autre chose, il faut comprendre ce qu’il sous-entend : de l’eau bleue, de l’eau grise et de l’eau verte. L’eau bleue, c’est l’eau de nos nappes phréatiques. Elle est effectivement utilisée pour abreuver les animaux ou pour irriguer les cultures mais elle ne représente que 3,6% de ce chiffre de 15 000 litres. L’eau grise, c’est une eau souillée, impropre à la consommation, utilisée pour le nettoyage et l’entretien des installations. Elle représente 2,9% du chiffre de 15 000 litres. Quant à l’eau verte, c’est l’eau de pluie, celle qui tombe que le bovin soit là ou pas. Celle qui tombe de manière naturelle puisqu’on n’a encore jamais vu un agriculteur faire la danse de la pluie au milieu de son champ… Cette eau verte représente 93,5% des 15 000 litres évoqués par la RTBF. On est donc loin de cette image d’une agriculture si vorace d’or bleu…

15 000 litres d’eau pour 1 kilo de viande ? Les calculs sont (vraiment) pas bons, Kevin !

Fake News grotesque : faire ce genre de généralité, c’est nier non seulement le modèle agricole wallon mais aussi la diversité de notre agriculture : une agriculture qui peut être traditionnelle, raisonnée, bio, en agroécologie,… C’est aussi sous-entendre que nos champs sont de grands amateurs de pesticides, alors même que, comme l’indique la RTBF dans son reportage intitulé « Si les exploitations ne misent pas sur la durabilité, elles sont vouées à disparaitre », d’un point de vue environnemental, les agriculteurs sondés déclarent à 70% déjà utiliser des techniques de conservation du sol et faire des efforts pour diminuer leur consommation d’intrants.

L’agriculture wallonne est une agriculture en transition, loin des images de fermes-usines à l’Américaine. C’est une agriculture soucieuse du bien-être animal et de l’environnement, quoi qu’en disent certains journalistes. C’est une agriculture diverse et variée qui travaille au quotidien pour et avec la nature, son outil de travail. C’est aussi une agriculture qui ne croule pas sous l’or et qui connaît le cout réel des produits phytopharmaceutiques : aucun agriculteur ne va aller pulvériser son champ pour le plaisir.

Alors, cette image d’agriculture faite d’engrais et de pesticide, on en parle ?

Les rots des vaches contribuent aux émissions de gaz à effet de serre, c’est scientifique. Mais parler de la situation mondiale ou ne prendre que le « coût » des vaches serait nier les spécificités, les avantages et les bénéfices de l’agriculture wallonne. Comme le dit la RTBF dans son reportage intitulé « Le monde agricole est de plus en plus conscient de son rôle face aux défis climatiques », les agriculteurs sont souvent pointés du doigt en matière d’environnement mais la Belgique n’est pas un mauvais élève. De nombreuses initiatives sont d’ailleurs mises en place pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le monde agricole […] La prairie est un énorme puits de carbone. Elle stocke le carbone toute l’année dans la terre. Ça compense donc les émissions de méthane de la vache. Donc l’écosystème prairie + vache ne produit quasiment pas de gaz à effet de serre. »

Comparer l’agriculture wallonne et l’agriculture mondiale… Ou la mettre sur le même pied que les fermes-usines américaines, c’est mentir aux concitoyens. Les Wallons peuvent être fiers de leur agriculture, quoi qu’en dise la RTBF.

N’est-il pas temps d’aussi pouvoir parler des bénéfices et des points positifs de notre agriculture dans les médias ? Ou l’agriculture ne sert-elle que de produits d’appels putaclic à la presse ? On est en droit de se poser la question. Il est en tout cas dommage qu’un média d’état joue le jeu des partis pris au lieu de rechercher l’objectivité. Heureusement que la RTBF est là pour nuancer les Fake News de la RTBF !