Associés au sein de Beelgium, Mathieu Decoster et Pierre-Antoine Couvreur ont planté 20.000 plants de lavandin pour leurs abeilles, à l’ombre du château de… Mielmont, à Jemeppe-sur-Sambre. Un nom prédestiné pour une belle aventure apicole sur fond d’une sincère amitié.

 

Ronald Pirlot

 

Samedi 19 novembre, 10h du matin. Tandis que la superbe drève du château de Mielmont (Jemeppe-sur-Sambre) arbore ses plus belles couleurs automnales, s’active non loin de là une armée de petits bras. A l’entrée du champ de 2,5 hectares règne un doux parfum provençal. Deux personnes séparent patiemment les plants de lavandin les uns des autres, afin d’en faciliter leur manipulation ultérieure. Au total, il y en a plus de 20.000 à planter durant le week-end.

A la manœuvre de cette première en Belgique, l’on retrouve Mathieu Decoster et Pierre-Antoine Couvreur, deux amis rencontrés sur les bancs de l’université alors qu’ils étaient étudiants en agronomie, et qui partagent une même passion pour l’apiculture. Au point de créer Beelgium, la logique contraction de leur amour pour les abeilles et d’une belgitude revendiquée.

 

Elevage de reines

« Chaque année, près de 3.000 tonnes de miel sont importées en Belgique. Et pour l’instant, l’on ne trouve aucun miel wallon en grandes surfaces. Notre objectif avec Beelgium, c’est de produire localement 1% de cette consommation annuelle belge, soit 30 tonnes » confie Mathieu.

Le défi a donné naissance à leur aventure commune en 2020. Leurs activités se partagent en deux pans complémentaires : l’élevage de reines (des buckfast et des abeilles noires) et la production de miel local. « Nos reines permettent de renouveler de veilles ruches, mais aussi de faire face aux importantes pertes. Il faut en effet savoir que la reine joue un peu le rôle du taureau reproducteur au sein d’un élevage bovin dès lors que c’est elle qui dicte la génétique » explique Mathieu.
 


20.000 plants de lavandin

Pour ces deux passionnés, l’idée de planter 20.000 plants de lavandin sur 2,5 hectares s’inscrit dans le cadre de leur production de miel. « Il faut savoir que la période de floraison traditionnelle pour nos abeilles débute en avril pour s’achever début juillet. L’idée avec ce lavandin destiné à fleurir en juillet, est d’obtenir une miellée supplémentaire jusqu’à la fin juillet, voire la mi-août » explique Mathieu. « Qui plus est, il existe un réel engouement pour les miels mono-floraux qui sont très demandés sur le marché. Avec cette parcelle, nous pourrons répondre à ce souhait en proposant un miel de lavande» ajoute Pierre-Antoine.

Et les deux compères d’entrevoir une première floraison partielle en 2022 et un plein rendement de la fleur en 2024. Une aventure pour laquelle ils ont mesuré les risques, notamment ceux encourus lors de conditions climatiques aussi défavorables que cette année. Ainsi ont-ils prévu une seconde valorisation de la plante, à l’issue de la floraison. « Nous entrevoyons d’en tirer de l’huiles essentielle destinée, notamment, pour le secteur de la cosmétique. D’où notre choix pour le lavandin dont la capacité de production est plus importante que la lavande » explique Pierre-Antoine.

 

Unique en Belgique

« Hormis une parcelle de 60 ares en Flandre davantage plantée à des fins touristiques, ce champ de lavandin constitue une première en Belgique. Tout comme le sera ce miel à la lavande que nous produirons. Pour certains, pareille culture sous nos latitudes peut paraître incongru. Et pourtant, presque chacun a, dans son jardin, un ou des plants de lavande qui pousse bien et se retrouve couvert d’insectes en été. Il faut juste au plant un sol drainant et un pH basique. Le soleil et les grillons, c’est davantage pour la carte postale » sourit Mathieu.

En attendant de pouvoir découvrir ces 2,5 Ha entièrement couverts de leurs couleurs provençales, il reste à Mathieu et Pierre-Antoine pas mal de travail. Après avoir planté avec l’aide de la famille et des amis venus spécialement pour l’occasion, il leur faudra désherber mécaniquement entre les lignes la première année. Ce qui s’assimile à pas mal d’heures de travail en perspective. « Quand on exerce sa passion, que l’on pratique une agriculture avec des produits sympas, des gens sympas et dans un cadre sympa, on ne peut que se lever le matin avec enthousiasme. Et l’on continuera à se développer tant que l’on s’amusera » conclut Pierre-Antoine. Des propos réjouissants à déguster comme un bon miel.

 

 

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Beelgium ... tout wallon tout miel

Beelgium s’installe à la ferme du château de Mielmont

 

Comme une bonne nouvelle ne vient jamais seule, la société de Mathieu et Pierre-Antoine a trouvé son pied-à-terre idéal, en l’occurrence une grange à la ferme du château de Mielmont. C’est là que Beelgium s’installera bientôt avec ses 400 ruches, l’élevage de reines et la miellerie. Une nouvelle étape pour une aventure apicole dont le succès dépasse leurs espérances. « Clairement, après deux ans, nous ne pensions pas être déjà où nous sommes » confient-ils.

Un succès qu’ils doivent à leurs compétences soupoudrées d’une bonne dose de motivation et d’un goût de l’entreprenariat clairement affiché. Mais aussi d’un sens de l’ouverture. « Nous enfonçons des portes. Tant mieux si nous parvenons à convaincre d’autres personnes de nous emboîter le pas et de cultiver des champs de lavande où nous pourrons venir placer nos abeilles. L’idée, c’est véritablement de pouvoir dupliquer ce modèle » conclut le duo. D’où leur souhait de montrer l’exemple.