Au Sud du pays, le secteur agricole est confronté à bien des difficultés : diminution du nombre des exploitations, forte concurrence des marchés étrangers, pression à la baisse sur les prix, normes sanitaires et environnementales toujours plus strictes, manque de concertation…Notre secrétaire général, José Renard, l'explique dans ce texte dans le dossier spécial "Trends-Tendance" consacré à la Wallonie.

 

La Wallonie compte environ 12.500 exploitations agricoles, un nombre en diminution constante, de l’ordre de 2 % par an. Dans les années 1960, subsistaient encore de petites exploitations, où la production suffisait à couvrir les besoins alimentaires d'une famille, qui se contentait de vendre les excédents. Ce type d'exploitations a progressivement disparu.

 

Des revenus incertains

En parallèle, la mécanisation et l'apparition de nouvelles variétés et techniques de culture ont réduit les besoins en main-d'œuvre. José Renard en fournit un exemple éloquent : « En 1960, un hectare de betterave produisait 3.500 kg de sucre pour 300 heures de travail. Aujourd’hui, on se situe aux alentours de 13.000 kg pour… 25 heures de travail ! » Alors que les surfaces agricoles représentent près de la moitié du territoire wallon, soit quelque 710.000 ha, les agriculteurs ne représentent plus que 2 % de la population active.

José Renard s’attriste de la situation actuelle, « pas toujours encourageante, avec des revenus stagnants ou incertains fortement dépendant des aides. Psychologiquement, un agriculteur préférerait bien sûr vivre de son métier, c’est-à-dire de la commercialisation de sa production. »

 

Anonymisation des produits

Le blues de l'agriculteur ne s’arrête pas là ! Il doit aussi se plier à des normes sanitaires et environnementales toujours plus strictes, bien souvent sans considération publique des efforts réalisés. Le respect de ces normes conditionne  l'octroi d'aides qui, occupent une place importante dans la formation du revenu de l'agriculteur.

Cela dit, insiste le secrétaire général de la FWA, « les agriculteurs sont conscients de leur responsabilité en matière environnementale. Environ la moitié des agriculteurs wallons adhèrent aux mesures agro-environnementales, un régime d’encouragement aux agriculteurs qui veulent en faire plus en la matière. Aujourd’hui, une exploitation sur neuf est bio ! »

Dans le même temps, notre interlocuteur note que « jusqu’il y a peu, le message délivré aux agriculteurs était 'votre métier, c’est de produire ; on s’occupe du reste !' Mais, de fait, lorsqu’un agriculteur livre son blé à une coopérative ou son lait à une laiterie, il ne sait que rarement ce qu’il advient de son produit. Il a dès lors l’impression que ses efforts pour rencontrer les nombreuses exigences de qualité ne se retrouvent pas dans le produit final délivré au consommateur. Il y a une certaine forme d’anonymisation du produit agricole dans le produit final fourni au consommateur. »

 

Appel à une meilleure concertation

Pour tenter de résoudre tous ces problèmes, le monde agricole réclame une meilleure concertation avec les autorités publiques, tous niveaux de pouvoir confondus. Il souhaite notamment pouvoir exprimer son point de vue avant que certaines normes ne lui soient imposées.

« Ce n’est pas tout de donner un cap, comme celui de réduire de 50 % l'utilisation des intrants chimiques », s’insurge José Renard. « Il faut aussi mettre en place de véritables alternatives, tenables financièrement et crédibles sur le plan environnemental. Cette année, suite à l’interdiction de certains produits pour lutter contre les pucerons dans les cultures de betteraves, on est arrivé  au final à des situations plus nocives   pour l’environnement que ce qui existait auparavant ! »

 

En quête de reconnaissance

La concertation exigée doit bien sûr s'étendre jusqu’à l'échelon européen. Les organisations d'agriculteurs n’ont de cesse de dénoncer le manque de cohérence des mesures prises, notamment dans le cadre des accords commerciaux internationaux. « D’un côté, dans ses propositions sur la nouvelle PAC ou dans ses propositions de stratégie 'De la ferme à la fourchette’, la Commission européenne souhaite renforcer le caractère durable de l'agriculture européenne. D’un autre côté, la même Commission négocie des accords de libre-échange avec des parties du monde pour autoriser des produits agricoles élaborés dans des conditions bien pires que les nôtres, que ce soit au niveau environnemental ou social. »

Le secrétaire général de la fédération agricole lance aussi un message aux citoyens : « L'agriculture est globalement en quête de reconnaissance car on en arrive parfois à une certaine perte de sens du métier. Cette reconnaissance concerne la fonction nourricière de notre profession avec, à la clé, une rémunération équitable de la production des agriculteurs. Là, c’est sans doute bien plus un appel aux consommateurs qu’aux pouvoirs publics : chacun doit penser à la provenance de son alimentation ! »