L’organisation de branche MilkBE a publié ce 11 octobre son nouveau rapport de durabilité qui vient confirmer pour autant que cela soit encore nécessaire que la durabilité est une priorité majeure du secteur agricole non seulement en paroles mais surtout dans les actes. C’est ainsi qu’en 6 ans, le nombre d’initiatives de durabilité prises a doublé. Plus de 96% de l’ensemble des producteurs laitiers belges participent. En moyenne, un producteur laitier s’engage sur 20 initiatives durables sur les 42 possibles, alors qu’il n’en prenait que 9 sur 35 en 2014.

José Renard

 

Les résultats du suivi des efforts de durabilité, mené depuis 2014, dans tous les maillons de la chaîne laitière parlent d’eux-mêmes. Ces résultats méritent d’être soulignés et rappelés à tous nos preneurs de décision, en particulier celles et ceux qui d’une part rêvent d’un grand soir environnemental et d’une révolution verte bien éloignée de celle qui valut en son temps le Prix Nobel de la Paix à Norman Borlaug pour sa contribution à la lutte contre la faim dans le monde et qui d’autre part ne voient dans notre agriculture que la source de tous les maux oubliant qu’elle fournit à nos concitoyens une alimentation plus qu’abondante, de qualité jamais égalée et à des prix accessibles pour l’immense majorité de la population..

 

Les domaines dans lesquels les producteurs laitiers ont réalisé des efforts de durabilité tout à fait significatifs sont divers et variés. Ainsi selon le rapport de durabilité de MilkBE:

  • les énergies renouvelables: 39% des producteurs  produisent eux-mêmes leur énergie durable (au moins 4.000 KWH/an) par le biais de panneaux solaires, d’une unité de bio-méthanisation ou d’une éolienne;
  • le bien-être animal: 60% des producteurs ont installé une brosse à vache dans l’étable;
  • l’utilisation parcimonieuse des ressources: 52% d’entre eux utilisent des sources d’eau alternatives;
  • l’économie circulaire: 61% utilisent des sous-produits de l’industrie alimentaire (comme des drêches de brasserie ou des pulpes de betteraves) pour nourrir leurs vaches.

 

Certains pourront toujours rétorquer qu’il ne s’agit que de bonnes pratiques qui devraient être encore plus généralisées. Les efforts de durabilité doivent en effet se poursuivre. Mais cela doit aller de pair avec la reconnaissance des efforts déjà fournis et une communication positive à leur sujet plutôt que d’être toujours focalisé sur ce qui doit encore être amélioré. Il est aussi indispensable que les autres maillons de la chaîne alimentaire soient prêts à rémunérer correctement ces efforts de durabilité. L’augmentation de la diffusion des bonnes pratiques passe par leur juste rémunération et l’obtention par les producteurs qui les appliquent d’un prix correct leur permettant de couvrir les coûts additionnels.

Par ailleurs, selon MilkBE, il ressort de l’étude quinquennale sur l’empreinte carbone du lait cru que celle-ci a reculé de 30% à environ 0,93 kg CO2-eq/kg de lait cru au cours des 20 dernières années. A cet égard, un des combats de la FWA est l’adoption et la généralisation d’un outil commun de calcul de l’empreinte carbone qui permettent véritablement à chaque producteur de comparer par rapport à la moyenne de ses collègues. A défaut d’un outil commun, le risque est important de voir chaque transformateur, chaque distributeur arriver avec son propre outil, parfois développé dans un autre pays et moins adapté aux réalités de l’agriculture wallonne et l’imposer à ses fournisseurs. Ce serait ajouter à la complexité de voir se multiplier les cahiers des charges de durabilité avec des exigences différentes et indicateurs spécifiques. Dans ce contexte, la FWA soutient fermement la généralisation de l’outil DECIDE mis au point par le CRA-W et donc le résultat de la recherche publique wallonne, outil qui en outre semble bien tenir compte de nos réalités agricoles wallonnes.

Il est bien évidemment fondamental que les objectifs de durabilité poursuivis par les autres maillons de la chaîne soient réalisés dans leurs propres processus et pas au détriment des producteurs de qui des efforts additionnels seraient exigés. A nos yeux, la participation des producteurs doit rester volontaire et le choix des initiatives durables à mettre en œuvre ne peut être imposé mais doit rester en phase avec les réalités de l’exploitation.

 

Comme la FWA l’a encore rappelé il y a 10 jours au Ministre-Président du Gouvernement wallon entouré de ses vice-présidents et de la Ministre de l’Environnement, les agriculteurs wallons ont la ferme volonté de s’engager dans les défis qui se posent à notre société, en particulier sur les plans environnemental et climatique. Les résultats du suivi réalisé par MilkBE pour la production laitière en attestent. Il faut toutefois rappeler que la contribution à la production de gaz à effet de serre du secteur agricole belge est de 8% seulement alors qu’elle est de 25% environ pour l’agriculture mondiale. Mieux, notre secteur a réduit ses émissions de près de 20% en 30 ans!

 

Notre modèle agricole wallon, basé sur des exploitations avec une structure familiale et caractérisé par une forte liaison au sol et un équilibre entre les cultures et l’élevage, a fait ses preuves sur le plan climatique. En outre, dans une région à forte densité de population avec une concurrence forte pour l’utilisation de l’espace avec des surfaces agricoles de qualité bonne à très bonne, le caractère «intensif» de notre agriculture doit être apprécié et examiné à la lumière de l’environnement général et des contraintes économiques. Cela n’est pas très pertinent de comparer la charge de bétail en Wallonie avec une moyenne européenne qui inclut des régions où une charge de 0,6 UGB/ha est déjà source de surpâturage.

 

Pour que les agriculteurs wallons puissent poursuivre les efforts déjà réalisés et continuer à exercer leur rôle pour relever les défis qui se posent à l’ensemble de notre société, leur secteur doit être vu comme un allié porteur de solutions, et doit être soutenu et préservé.

 

Nous savons tous que les objectifs à concilier sont multiples: d’une part la rentabilité des fermes familiales wallonnes tout particulièrement pour les jeunes avec de fortes inquiétudes liées aux résultats convergents de différentes études concernant les impacts sur notre agriculture et sa rentabilité des stratégies issues du Pacte vert européen , notre souveraineté alimentaire, le bien-être des consommateurs, en particulier l’accès à l’alimentation de qualité à un prix raisonnable et d’autre part la prise en compte des enjeux climatiques et environnementaux et la stratégie à mettre en place pour relever ces défis. Mais à la FWA nous voulons répéter encore et encore, le marteler presque, qu’il ne peut y avoir de véritable durabilité du secteur agricole sans une prise en compte équilibrée des 3 piliers du développement durable et une véritable reconnaissance de l’impératif de la durabilité économique et sociale.

 

Dimanche dernier, c’était le retour de la manifestation des jeunes pour le climat. La FWA n’y était pas. Pourquoi? D’abord parce que les organisateurs n’ont pris aucun contact avec nous. Ensuite, dans un souci de cohérence: comment soutenir et partager des revendications portées par des personnes qui dès la fin de la manifestation se précipitent pour déclarer à la presse qu’il faut démanteler l’agriculture en utilisant tous les raccourcis possibles (agriculture industrielle, lobbys et j’en passe)?

Pour rappel, la FWA a participé à plusieurs reprises à des marches «climats» au fil des dernières années, montrant sa volonté d’ouverture et malgré le regard très critique de certains organisateurs vis-à-vis de notre secteur. Toutefois, il s’avère que lorsque nous avons invité ces mêmes organisateurs à venir à notre rencontre pour en connaître plus sur notre secteur et la réalité agricole wallonne, ils ont ignoré nos invitations.

Ne pas participer à cette marche en tant qu’organisation ne veut évidemment pas dire que nous ne nous préoccupons pas de la question climatique, loin de là! Comme nous l’avons dit souvent, l’agriculture est l’une des premières victimes du changement climatique, et se veut résolument porteuse de solution. Un chemin largement entamé et poursuivi avec détermination par notre secteur, comme le démontrent notamment les résultats du rapport MilkBE.