A l’heure où nous écrivons ces lignes, les négociations relatives au Brexit sont toujours en cours entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. A quelques jours seulement de la fin de la période de transition, aucun accord n’est conclu, le suspense est insoutenable et les inquiétudes grandissantes. Mais que ce soit avec ou sans accord, le Brexit aura des conséquences dans de nombreux domaines et le secteur agricole ne devrait pas être épargné.

Valentine Huys

 

Période de transition

Le Royaume-Uni ne fait déjà plus partie de l’Union européenne depuis le 1er février 2020. Le Brexit a donc déjà été acté, toutefois, reste à savoir quelles seront les nouvelles relations qui existeront entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Le pays est effet entré dans une phase de transition qui prendra fin le 31 décembre 2020. Durant cette période, les relations entre le Royaume-Uni et les pays de l’Union européenne sont restées semblables à celles que l’on connaissait avant le Brexit. Cette phase de transition est destinée à la négociation des relations futures qui existeront entre l’Union européenne et le Royaume-Uni. C’est donc le 1er janvier 2021 que la nouvelle relation entre l’Union européenne et le Royaume-Uni prendra cours. S’il y a un accord conclu entre temps, c’est la relation négociée qui prévaudra entre le Royaume-Uni et l’Union. En revanche, s’il n’y a pas d’accord conclu, le Royaume-Uni deviendra un pays tiers comme les autres pour l’Union européenne avec les conséquences qui s’ensuivent.

 

Impacts du Brexit sur le secteur agricole européen

Le Royaume-Uni s’est officiellement retiré de l’Union européenne depuis le 1er février 2020, ce qui implique que le budget de la PAC a déjà été impacté par cette sortie puisque le Royaume-Uni était un contributeur net à ce budget. Mais outre le budget de la PAC déjà impacté, le Royaume-Uni est un grand importateur de produits agricoles en provenance de l’UE et notamment de la Belgique. Les produits du secteur agricole étant fortement exposés aux tarifs douaniers et aux checks sanitaires, l’accord commercial en cours de négociation est d’une importance capitale.

 

Accord commercial capital

Le Royaume-Uni fait partie des pays vers lesquels l’Union européenne, et notamment la Belgique, exporte le plus de produits agricoles. Même s’il y a un accord, il y aura des perturbations sur les marchés. En effet, le départ du Royaume-Uni de l’UE impliquera de nouvelles formalités applicables aux échanges commerciaux, engendrant des coûts qui n’existaient pas lorsque le Royaume-Uni faisait partie de l’Union européenne. Il s'agit notamment des procédures à la frontière puisqu’il y aura des vérifications supplémentaires à opérer comme la conformité aux normes, la détermination des règles d'origine, des inspections sanitaires et phytosanitaires. Les délais de transport et de livraison seront donc touchés en raison des formalités administratives et techniques à la douane, ce qui pourrait avoir notamment des conséquences sur la livraison des animaux vivants ou encore sur la conservation des produits frais et ce, même s’il y a un accord. Si vous exportez des animaux ou des produits vers le Royaume-Uni, ces derniers seront soumis à un contrôle à l'exportation par l'Afsca. Pour plus d’informations sur les formalités à remplir, rendez-vous sur leur site: www.afsca.be/brexit/fr/export/

Les flux commerciaux seront impactés, mais de manière encore bien plus importante si les discussions ne permettent pas d’aboutir à la conclusion d’un accord d’ici le 31 décembre 2020. Un accord de libre-échange serait idéal pour minimiser les effets du Brexit sur les échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Il permettrait de ne pas appliquer de nouveaux tarifs douaniers, de frais, de quotas entre le Royaume-Uni et l’Union européenne. Un tel accord privilégierait la coopération sur le plan technique, les normes, procédures. Des engagements réciproques pour le transport ou encore la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles seraient des éléments clés pour que des exigences différentes n’impactent pas le commerce. S’il n’y a pas d’accord de ce type conclu entre les deux entités, de nombreux obstacles aux relations commerciales et donc, aux échanges de produits agricoles, pourraient se poser. On notera par exemple que ce qui est actuellement conforme pour les échanges commerciaux ne le sera plus nécessairement. Il y a également la possibilité par la suite pour le Royaume-Uni d’instaurer des mesures limitant les importations. Les tarifs douaniers pour les produits agricoles en provenance de l’UE pourraient s’élever de 10% à plus de 30%, ce qui aurait des conséquences catastrophiques pour les échanges.

Tous ces éléments créent un risque important d’augmentation des prix pour les consommateurs britanniques. En effet, ces paramètres pourraient faire augmenter plus ou moins fortement les prix des produits agricoles européens importés au Royaume-Uni. Dans ces conditions, la demande britannique pour les produits en provenance de l’Union européenne pourrait chuter plus ou moins rapidement. Cela dépend entre autres de la disponibilité de produits de substitution. Il est également possible que d’autres pays puissent subvenir aux besoins du Royaume-Uni. Les futurs accords que pourrait conclure le Royaume-Uni avec d’autres pays tiers seront déterminants.

Dans quelle mesure le Royaume-Uni sera-t-il prêt à payer plus cher qu’auparavant pour continuer à consommer les produits en provenance de l’Union et donc de la Belgique ? Difficile d’y répondre. L’offre mettant généralement du temps à s’adapter à la demande, il y a le risque qu’un surplus se crée au sein de l’UE. Il est en effet compliqué de diminuer rapidement les quantités produites ou de trouver d’autres canaux pour écouler ces produits, si ceux-ci n’étaient plus achetés par le Royaume-Uni. Si surplus il devait y avoir, l’impact sera conséquent pour tout le secteur.

Le Royaume-Uni représente l’un des plus importants partenaires commerciaux pour les exportations de produits agricoles en provenance de la Belgique. La relation qui sera établie entre l’Union européenne et le Royaume-Uni à partir du 1er janvier 2021 sera donc déterminante.

 

Négociations toujours en cours

Le calendrier des négociations prévoyait la conclusion d’un accord le plus rapidement possible pour que celui-ci puisse être mis en place pour le 1er janvier 2021. C’était sans compter les divergences entre les deux parties. En effet, il subsiste encore des désaccords sur certains points, ce qui implique qu’il n’y ait toujours pas d’accord conclu. Les équipes de négociation poursuivront leur travail jusqu’au bout, et ce, malgré le fait que l’échéance de la phase de transition ne soit plus qu’une question de jours. Les discussions étant toujours en cours à l’heure où nous écrivons ces lignes, même si un accord pouvait être trouvé, il n’en reste pas moins sûr qu’il puisse entrer en vigueur pour le 1er janvier 2021.

S’il n’y a pas de possibilité avant le 31 décembre 2020 de trouver un terrain d’entente pour aboutir à un accord, le secteur agricole européen sera durement touché, tout comme bon nombre d’autres secteurs. Un fonds européen de 5 milliards d’euros est prévu pour tenter d’atténuer le choc du Brexit au sein de l’Union européenne. Quelle que soit l’issue des négociations, la FWA mettra tout en œuvre pour qu’un soutien adéquat soit apporté au secteur agricole.

 

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