Un chemin sinueux

Photo ©Pavlo Vakhrushev

Dans le Pleinchamp n°10 (07/03/24 p. 9), nous avions rapporté un signal positif émis par la Commission agriculture du Parlement européen en faveur du secteur agricole dans le cadre du renouvellement des mesures commerciales autonomes avec l’Ukraine. Cependant, le chemin législatif a été sinueux, marqué par des évolutions constantes du texte, de la plénière jusqu'à un accord avec la Commission et le Conseil des Ministres. Un fait rare s'est produit: ce dernier est revenu sur l'accord trouvé.

Laura Lahon, Conseillère Coopératives et chargée de projet céréales bio et Ségolène Plomteux, Conseillère en politiques européennes Conseil, Analyse et Politique (CAP)

Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, la mise en place de mesures douanières avait pour objectif de soutenir l'économie ukrainienne. Toutefois, ces tarifs préférentiels ont entraîné une augmentation significative des importations, parfois multipliées par six, sur le marché européen de nombreux produits tels que les œufs, la volaille, le sucre et le blé, entraînant une chute des prix de ces produits.

Clause de sauvegarde automatique

En février, la Commission a proposé de renouveler ces accords pour une période d'un an à partir de juin 2024. Cette proposition comportait un nouveau mécanisme: une clause de sauvegarde automatique pour certains produits, agissant comme un frein pour réintroduire des contingents tarifaires si les importations dépassaient celles d'une période de référence. Les débats se concentrent donc sur deux points: les produits concernés et la période de référence prise en compte.

Le Parlement européen, attentif aux préoccupations du secteur agricole, avait initialement inclus les principaux produits agricoles tels que la volaille, les œufs, le sucre, l'avoine, le maïs, le miel, les gruaux et le froment dans le champ d'application des mesures de sauvegarde automatique. Ces mesures prévoyaient la réintroduction des contingents tarifaires si les importations de ces produits sensibles excédaient la moyenne arithmétique des quantités importées entre 2021 et 2023. Cependant, lors des négociations avec la Commission et le Conseil, un compromis a été nécessaire. Cet accord a exclu le froment du mécanisme de sauvegarde automatique et a limité la période de référence aux années de conflit, soit 2022-2023.

Compromis

À ce stade, le texte est généralement ratifié sans modification par les colégislateurs (le Conseil et le Parlement). Cependant, suite aux réactions vives à travers l'Europe, y compris celle du Président français Emmanuel Macron, la Présidence belge du Conseil a tenté un compromis en incluant finalement le deuxième semestre de 2021 dans la période de référence et en introduisant une déclaration de contrôle renforcé concernant le froment, sans pour autant l'inclure dans la fameuse clause de sauvegarde.

Le texte doit donc encore être approuvé par le Parlement européen, qui avait adopté une position plus protectrice à l'égard du secteur agricole que la Commission et le Conseil. Les prochaines semaines devraient apporter des réponses à ces questions.