Vision de l'agriculture

Le PPE, Parti Populaire Européen, d’inspiration démocrate-chrétienne et conservatrice, tenait ce mardi 19 septembre une conférence au sein de l’hémicycle bruxellois. Au programme, des discussions sur la vision de l’agriculture qui sera défendue par le parti au cours des prochaines années. Le parti à qui l’on doit le retrait de l’agriculture de la directive « émissions industrielles » semble en effet miser beaucoup sur le secteur agricole, mais aussi sur son évolution, principalement technologique. Entre innovation, nécessité d’adaptation au changement climatique et retour du loup dans les campagnes européennes, le PPE propose un étonnant mélange de technocratie et de conservatisme.

Olivia Leruth

Hémicycle du parlement européenL’hémicycle du Parlement Européen était rempli comme rarement ce mardi 19 septembre, date que le PPE, le Parti Populaire Européen, avait choisie pour inviter le monde agricole à venir débattre des enjeux de la prochaine législature. Point de bottes ni de salopette à l’horizon, le monde agricole étant, en toute logique, plutôt présent via ses représentants, dont faisait partie la Fédération Wallonne de l’Agriculture, invitée à assister à cette grand-messe de réunion entre politique et agriculture.

Il faut dire que le PPE s’est montré récemment très actif dans son combat pour le monde agricole. On se souviendra particulièrement ces derniers mois de son combat contre la fameuse et chahutée Loi pour la Restauration de la Nature, ou encore contre l’application à l’agriculture des normes liées aux émissions industrielles. Un combat porté notamment par l’un de nos représentants belges au PPE, le bastognard Benoît Lutgen.

Entre valeurs conservatrices et attrait pour l’innovation

C’est la Présidente du Parlement, Ursula Von Der Leyen qui donne le ton par une allocution retransmise sur grands écrans. Un discours articulé autour de l’histoire de Lorenz, un garçon de 14 ans originaire de Basse-Saxe, région natale d’Ursula, qui espère bien pouvoir poursuivre un jour l’activité agricole familiale. Le cadre est planté, et donnera à l’ensemble du discours le ton émotionnel voulu, lié aux rêves et espoirs de ce jeune garçon que l’on doit aider à marcher dans les traces de la génération précédente.

Avant de passer directement au thème qui occupera la plus grande partie de son discours : les nouvelles technologies. Pour la Présidente du Parlement européen, certains agriculteurs « sont également des pionniers d’un nouveau type d’agriculture. Vous adoptez de nouvelles technologies, des satellites aux drones, pour augmenter les rendements et réduire les coûts […] au profit de la nature ». Elle cite dans la foulée les trois solutions que l’Europe (du PPE) compte développer pour les agriculteurs : la possibilité d’accéder aux données satellitaires pour mieux gérer les sols, notamment du point de vue des intrants et de la gestion de l’eau, un accès à l’internet à haute vitesse dans les campagnes, pour permettre aux zones rurales d’utiliser les nouvelles technologie à leur plein potentiel, et enfin, l’adoption d’une nouvelle proposition sur les nouvelles techniques génomiques (NGT) pour « donner plus de clarté aux chercheurs et plus d’options aux agriculteurs ».

A côté de cela, Ursula Von Der Leyen abordera l’inévitable thème du changement climatique, dont les agriculteurs sont « parmi les principales victimes », et, plus étonnant pour un discours aussi généraliste, le thème des grands prédateurs et la menace qu’ils représentent pour « nos » animaux.

De la difficulté d’adopter une règle pour tous les états membres

Viennent ensuite les débats, laissant chaque représentant politique aborder sa réalité, ses besoins, rappelant une fois encore à quel point il peut être difficile d’écrire des règles qui conviennent à tant de réalités différentes. On peut prendre parmi tous les exemples cités celui de la Suède, représenté par son Ministre des Affaires rurales, Peter Kullgren qui souligne l’importance de travailler au niveau local : « l’Union européenne ne voit pas les différences qui existent en son sein. Mais nos pays sont différents. Et on ne peut pas demander de réduire encore de 50% l’usage des produits phytos là où l’usage en est déjà très bas ».

Le seul thème qui mettra tout le monde d’accord est le besoin urgent de diminuer la charge administrative : « Il est important qu’ils (les agriculteurs) soient dans les champs, et pas derrière un écran à remplir des formulaires » assène Norbert Lins, Président de la Commission Agriculture du Parlement Européen.

La transition verte AVEC les agriculteurs, pour les zones rurales

Dernier thème qui s’invite dans les discussions : le thème de la transition écologique. Si certains, dont Ursula Von Der Leyen la première, regretteront le procès d’intention régulièrement fait aux agriculteurs, qui sont pourtant « les gardiens de la nature et de la biodiversité », d’autres interventions prendront le pli de défendre un rôle actif pour les agriculteurs dans cette transition. Peter Kullgren, avec un sens certain de la formule, explique : « Nous voulons une transition verte, pas une mort verte pour les agriculteurs ! La technologie est là. L’agriculture n’est pas un obstacle, elle est au cœur même de la construction d’une société verte ».

Un thème qui sera également repris dans les conclusions amenées par Siegfried Muresan, Vice-Présidet du PPE, qui achèvera sur un appel du pied aux états membres en demandant plus de fonds pour l’Europe : « Le monde change, nous devons évoluer, nous moderniser. Mais lorsqu’une nouvelle priorité est fixée, les anciennes priorités, comme l’agriculture, ne doivent pas être oubliée » explique-t-il en faisant allusion aux fonds débloqués par l’Europe pour de nouvelles priorités comme l’accès au numérique. « Nous poursuivons un objectif commun : moins polluer, et lutter efficacement contre changement climatique. […] Si nous voulons que l’Europe fasse plus, nous devrons nous assurer qu’elle obtienne plus aussi. Nous devrons convaincre nos contribuables, et leur rappeler que si l’on veut plus, on ne peut pas faire avec moins. »

Envie d'aller plus loin dans les thématiques européennes ?

Benoît Lutgen (PPE/Engagés) sera présent le mardi 7 novembre prochain à la FWA pour parler de son action, des derniers travaux initiés au niveau européen et répondre à vos questions. 

Rencontre avec Benoit Lutgen